Le Centre d’Etude et de Formation en Criminologie et Droits Humains (CEFOCRIM) de l’Ecole de Criminologie (ECOCRIM) de l’Université de Lubumbashi (UNILU) et la Direction Provinciale de l’Institut Congolais de Conservation de la Nature (ICCN) ont organisé le Colloque international qui s’est tenu à Lubumbashi, dans le Haut Katanga, en République Démocratique du Congo, du 19 au 21 octobre 2022.
Ce Colloque sur la « Sécurité et protection des espèces sauvages en République Démocratique du Congo. Etat des lieux, enjeux actuels et perspectives » a réuni les chercheurs des différentes universités (Université de Lubumbashi, Université de Kinshasa, Université Libre de Bruxelles, Institut Supérieur de Commerce de Lubumbashi, etc.), les autorités nationales de gestion de la faune dont l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN), les partenaires techniques et financiers de la conservation. Les autorités de justice pénale ont partagé leur expertise sur le trafic illicite d’espèces sauvages et le renforcement de la législation sur les espèces sauvages à travers un état des lieux sur la criminalité qui affecte la faune et flore, et des discussions sur les moyens de renforcer les cadres juridiques pour lutter contre le commerce illégal et améliorer le contrôle du commerce légal en République Démocratique du Congo.
La réunion de trois jours a fourni un forum de discussion sur l’état actuel et la stratégie future, dans le cadre de la lutte contre la criminalité faunique en République démocratique du Congo. Aussi, les participants ont relevé les défis à résoudre comprenant :
- Renforcement des curricula de formation en criminologie et sur la criminalité liée aux espèces sauvages ;
- Amélioration de la coopération transfrontalière sur les enquêtes sur les criminels organisés de la faune ;
- Développement des bases de données accessibles sur la criminalité liée aux espèces sauvages ;
- Amélioration de l’efficacité de gestion des aires protégées et implication des communautés locales dans la lutte contre la criminalité faunique.
Durant le colloque, les échanges ont relevé que le système judiciaire en République démocratique du Congo est encore modéré dans l’application des sanctions sur la criminalité liée aux espèces sauvages, tant en termes de peines de prison que d’argent. La question de la criminalité faunique n’étant encore que faiblement intégrer dans le curricula des facultés de droits et des écoles de la magistrature.
L’ICCN a présenté l’analyse de la situation des aires protégées en RDC dans le contexte d’instabilité nationale et régionale. Les experts de l’ICCN ont souligné les possibilités pour la RDC de continuer à mettre en œuvre des programmes de conservation et d’améliorer leurs cadres juridiques avec le soutien des partenaires techniques comme Forgotten Parks et Financiers comme l’USAID à travers son programme CARPE. En outre, en tant qu’organe étatique de gestion des aires protégées, le gouvernement a mis à la disposition de l’ICCN un corps militaire spécialisé dans la protection des aires protégées (CorPPN). Ce dernier travaille à anticiper, défendre et traquer tous les contrevenant à la loi sur la conservation de la nature. Mais les défis restent énormes.
Pour Forgotten Parks, la directrice exécutive et chef de site du Parc National de l’Upemba Tina Lain a présenté une nouvelle approche de Résolution des Problèmes dans la Lutte contre la Criminalité Faunique. Cette nouvelle approche étant la police axée sur la résolution des problèmes par l’analyse et l’implication des parties prenantes. Il nous est impossible d’arrêter tous les braconniers et souvent ceux-ci sont libérés par faute d’un système judiciaire qui marche. Le travail axé sur les problèmes consiste à mieux comprendre le contexte dans lequel les crimes fauniques se passent, les acteurs, leurs vraies motivations, et trouver des solutions dans le long terme. Non seulement regarder les crimes mais aussi comprendre ce qui pousse certaines personnes à faire ce qu’elles font, par exemple à cause de la pauvreté. La police par résolution des problèmes a été développée pour aider les policiers à trouver des moyens de réduire la criminalité sans ressources supplémentaires substantielles. Sa présentation a donc expliqué comment les idées et les principes de RP peuvent être adaptés aux problèmes de protection de la faune. Il faut noter que l’étude la plus récente des projets de police axés sur les problèmes a montré une réduction moyenne de 34 % de la criminalité et des troubles. Cette approche nous aidera aussi à rétablir des relations de confiance et respect mutuel avec les communautés riveraines des aires protégées.
L’activité de Soutien aux Forêts et à la Biodiversité (FABS) de l’USAID a présenté son projet d’élaboration de la stratégie nationale de lutte contre la criminalité faunique en cours d’élaboration avec l’appui de l’ICCN et de l’UNODC. Cette stratégie servira de « ligne directrice » de l’application de la loi sur le commerce illégal des produits forestiers et fauniques, du rôle de la gestion durable des ressources naturelles dans la prévention et la lutte contre la récolte et le commerce illégaux, et de la collaboration entre les parties prenantes et les communautés locales pour lutter contre la récolte et le commerce illégaux.
Pour les différents chercheurs des universités ((Université de Lubumbashi, Université de Kinshasa, Université Libre de Bruxelles, Institut Supérieur de Commerce de Lubumbashi,etc.), les différents acteurs impliqués dans la question de la lutte contre la criminalité faunique sont appelés à développer des cadres d’analyse sur les différents instruments nationaux de contrôle du commerce de la faune et de la flore, et internationaux comme la CITES, soulignant qu’une législation efficace devrait également tenir compte des besoins des communautés rurales qui vivent aux côtés de la faune. Aussi, des cadres de collaboration et d’apprentissage sont importants pour analyser les leçons apprises et des mesures supplémentaires afin de mettre en œuvre et faire respecter efficacement les cadres juridiques nationaux et internationaux.
En somme, les participants ont encouragé les organisateurs à renforcer les échanges entre les experts afin de « redoubler d’efforts pour prévenir, détecter et sanctionner » les crimes contre les espèces sauvages. Pour ce faire, toutes les parties prenantes devraient travailler en réseaux en vue de renforcer le cadre juridique, augmenter la coopération régionale et nationale, collaborer davantage avec les communautés locales pour prévenir et lutter contre l’exploitation et le commerce illégaux d’espèces sauvages et de produits forestiers, et sensibiliser aux moteurs et aux impacts de la criminalité liée aux espèces sauvages.